Écouter c’est bien, comprendre c’est mieux | Anaëlle
Je suis Anaëlle. D’ici à l’été, je me suis engagée dans une découverte d’ATD Quart Monde. Six mois, c’est long et court à la fois. Six mois pour mieux comprendre, mieux intégrer, mieux m’impliquer. Six mois pour avancer sur mes réflexions, pour me lancer des défis. Six mois, c’est très court en fait. ATD Quart Monde m’a demandé de vous partager ici quelques chroniques de cette expérience.
Une personne arrive de bonne heure. Petit à petit, une autre tête passe la porte, puis deux, puis trois. Des visages connus. Ça me fait plaisir de les voir. Aujourd’hui, nous nous réunissons pour discuter du thème de la Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté. Le thème abordera les Droits de l’enfant.
À ATD, j’apprends à écouter. Quand j’étais à l’université, je devais me forcer à prendre la parole. Aujourd’hui, je dois me forcer à me taire. L’un n’est pas plus facile que l’autre.
Sur la table : du café, du thé et de quoi nous sucrer le bec. Autour, nos sourires. Nous abordons le thème. Très vite, la conversation s’oriente. Nous discutons des placements des enfants. Jugés trop nombreux. Après différentes prises de paroles, une personne élève la voix pour faire part de son inconfort. Placer un enfant, c’est parfois nécessaire. On ne laisse pas un enfant subir de la violence. Des personnes merveilleuses accueillent des enfants pour leur donner une chance. Nous connaissons des exemples dans notre entourage. Ces personnes ne sont pas présentes aujourd’hui. C’est dommage.
La discussion semble mal interprétée. Personne n’affirme qu’il ne faut pas agir dans des situations critiques. L’avis est qu’on sépare un peu rapidement l’enfant d’une famille pauvre. Punie pour être pauvre. Grâce à cette intervention, les propos peuvent être nuancés. Les arguments peuvent être mieux transmis. D’éventuels malaises ou frustrations sont dissouts.
Écouter c’est bien, mais comprendre c’est mieux. Et pour mieux comprendre, il faut poser des questions. Pour oser poser des questions, il faut se sentir en confiance. Ici, je sens qu’il y a un espace pour se rendre vulnérable. Un espace sécurisant si précieux. On pose des questions. On donne notre avis. On parle même de notre vécu. Ce sentiment de sécurité est essentiel pour que celles et ceux qui prennent rarement la parole acceptent de poser leurs mots sur la table.
Autour de cette même table, c’est un bâton de parole invisible qui circule. Les voix ne s’entrecoupent pas. Une voix se lève. Les oreilles accueillent. Un silence. Une autre voix se lève. La courtoisie est de mise. On s’écoute, on se respecte.
La dernière voix à s’être élevée a laissé ses paroles planer au dessus de nos têtes. Chaque situation est particulière. Le gouvernement doit prendre en compte une grande population. Quelle solution pour du cas par cas dans ce contexte ? Aujourd’hui, personne du groupe n’a de réponse. Aucun dirigeant, juge ou autre influenceur n’est présent avec nous. Je me demande ce qu’il ou elle aurait répondu. Croisement des savoirs. Croisement des pratiques. Croisement des pouvoirs. Cela me donne le goût d’aller plus loin, toujours plus loin dans la réflexion.
Découvrez également la chronique Réveiller les murs endormis d’Anaëlle.
© Photo, Myles Tan, Unsplash