Nous, femmes en situation de pauvreté
« Nous femmes en situation de pauvreté avons appris, suite aux obstacles de la vie, à nous débrouiller et à développer des forces »
Au cœur de l’automne 2014, lorsque tous et toutes profitaient des vives couleurs des paysages de l’Estrie, un groupe de onze femmes se réunissaient fidèlement tous les vendredis après-midi dans un petit local de la Bibliothèque municipale de Sherbrooke. Pour vous en raconter un peu sur ces femmes et sur leur projet, je dois d’abord me présenter. Je m’appelle Myriam Legault, certaines m’ont déjà croisée dans les Universités populaires Quart Monde durant la dernière année ; je suis étudiante à la maîtrise en travail social de l’Université de Sherbrooke. Dans le cadre de mes études, j’ai fait la rencontre du Mouvement ATD Quart Monde et je me suis vite sentie interpelée par ces lieux de partage et de dialogue avec les personnes en situation de pauvreté. Un peu plus tard, afin d’obtenir mon diplôme, je devais bâtir un projet de stage relié à l’intervention sociale. C’est alors que j’ai eu l’idée de ces rencontres avec quelques femmes en situation de pauvreté, qui souhaiteraient participer à des discussions sur leur parcours de vie et à des réflexions collectives sur la pauvreté. C’est ainsi que nos rendez-vous du vendredi ont vu le jour!
Neuf femmes en situation de pauvreté, Sophie Boyer, volontaire d’ATD, et moi-même avons, durant six semaines, abordé l’histoire de vie de chacune et réfléchi sur les différents contextes qui peuvent mener à la pauvreté. Au fil des quatre premières rencontres constituées de différents ateliers, chacune a parlé de son enfance, de son adolescence, de ses amis, de sa famille, de ses difficultés, de ses blessures, de ses rêves et passions d’aujourd’hui, etc. Une relation de confiance mutuelle s’est tissée et la parole s’est tranquillement libérée! À la cinquième rencontre, nous avions déjà parcouru tant de chemin ensemble, les feuilles rougeoyantes de l’automne étaient toutes tombées et Noël approchait; il fallait tenter de rassembler nos idées et trouver, de tout ce qui avait été dit, les savoirs sur la pauvreté que tous ces vécus entremêlés nous permettaient d’énoncer. Nous sommes alors parties de la formule « Nous femmes en situation de pauvreté… » et avons tenté de compléter la phrase. Voici le résultat de notre processus :
Nous femmes en situation de pauvreté avons de la richesse intérieure, des forces, et des talents qui doivent être reconnus
Nous femmes en situation de pauvreté sommes capables de surmonter les obstacles de la vie
Nous femmes en situation de pauvreté essayons d’être solidaires et nous comprendre les unes les autres
Nous femmes en situation de pauvreté contribuons aussi en faisant du bénévolat
Nous femmes en situation de pauvreté souhaitons que la société arrête de croire les préjugés et de juger les personnes par rapport à leur situation de pauvreté
Nous les femmes en situation de pauvreté, n’avons pas les moyens de tout payer et cela crée un stress difficile à vivre tous les jours de la vie
Nous femmes en situation de pauvreté affirmons que la valeur d’un être humain n’est pas seulement reliée à son revenu et à sa situation sociale
Nous femmes en situation de pauvreté vivons souvent le manque ou la perte et cela nous oblige à remettre certains projets à plus tard
Nous femmes en situation de pauvreté pensons qu’il faut remettre en question le système économique dans lequel nous vivons pour s’attaquer aux vraies causes de la pauvreté.
Nous femmes en situation de pauvreté avons appris, suite aux obstacles de la vie, à nous débrouiller et à développer des forces
Nous femmes en situation de pauvreté sortons de l’isolement en nous entourant pour retrouver un sentiment d’appartenance
Comme vous voyez, nous avons bien travaillé ! En conclusion, j’aimerais dire que j’ai trouvé cette expérience très enrichissante et j’ai été très touchée que les femmes du groupe acceptent de me donner leur confiance, ainsi que de se faire confiance mutuellement pour développer un réel échange et faire évoluer les savoirs sur la pauvreté.