Choisir des moyens modestes, à contre-courant financièrement

(Texte tiré de notre infolettre #162 – série Volontariat #3)

Ça fait quoi un ou une volontaire d’ATD Quart Monde

C’est le projet de société qui définit l’engagement des volontaires et non les tâches, soit bâtir une société sans misère, où toutes et tous vivent dans une égale dignité. Par conséquent, les volontaires font ou peuvent faire une variété de choses.

Depuis que je suis volontaire, je lis des livres dans un parc de Montréal, ou dans les rues de Dakar, avec des enfants qui vivent dans la pauvreté. Je rencontre des politiciens pour faire valoir les droits des personnes qui vivent la pauvreté. Je rencontre des familles et des personnes seules qui en arrachent. Je participe à la rédaction de mémoires que nous présentons à des autorités. Je mobilise des bénévoles pour animer des ateliers dans un festival. Je mets en page une infolettre, je publie des articles sur un site web, je soutiens des personnes à l’écriture de leurs idées. Je fais de la comptabilité. Je passe des heures avec des résidents d’un campement. Je suis interviewé à la radio. Je répare la plomberie ou je repeins nos bureaux. Je prépare des personnes en situation de pauvreté à prendre la parole à l’université, devant un député et à l’ONU. Je fais le ménage. Avec une maman, je vais rencontrer son intervenante de la DPJ. Je monte une pièce de théâtre. Je coordonne un événement public qui réunit une centaine de personne. Etc.

Je ne fais pas tout cela en même temps. Chacun et chacune agit avec ses forces, mais aussi en dépassant ses faiblesses pour que notre société fasse une place reconnue aux personnes les plus pauvres. 


À contre-courant financièrement
de Daniel Marineau, Volontaire permanent

Au début d’ATD Quart Monde, les volontaires étaient vraiment bénévoles. Il n’avait pas de financement, sinon quelques dons pour l’action avec les familles. Mais Joseph Wresinski déplorait que les volontaires ne restaient pas longtemps. Ils n’avaient pas le temps d’apprendre de la vie des personnes vivant dans la pauvreté. Il a alors cherché des fonds pour financer le volontariat, modestement. Quelques femmes se sont démarquées, elles étaient avec lui depuis presque le début. Leur engagement en a été affermi.

Les volontaires ont convenues qu’elles ne se bâtiraient pas une carrière sur la pauvreté des autres. Depuis les volontaires se partagent une indemnité qui leur permette de vivre, la même pour tous, peu importe le niveau de responsabilité, peu importe la tâche accomplie, peu importe l’ancienneté.

Elles ne parlaient pas d’anti-capitalisme à l’époque. Mais elles ont insufflé au Mouvement et aux volontaires un mode d’engagement qui ne s’appuie pas sur le gain personnel ou la recherche du profit.

Ce choix de vie modeste est un défi lancé à notre société : ce n’est pas obligé de s’enrichir toujours plus pour être efficaces ou pour être heureux, encore moins pour être satisfaits et épanouis.

Ce choix d’engagement avec des moyens modestes est contre-intuitif pour recruter de nouvelles personnes. À Montréal, je préviens les jeunes : « probablement que tu ne pourras pas voyager chaque année ou pratiquer tous les loisirs. » Au Sénégal également, je disais : « Ce n’est pas certain que tu pourras soutenir ta famille élargie avec l’indemnité de volontaire. » Dès lors, chacun peut faire un choix éclairé, et être authentiquement « volontaire ». D’ailleurs, ce sont les volontaires entre eux qui déterminent l’indemnité nécessaire selon les réalités des différents pays.

Ce choix est une manière de vivre nos principes de base : « La misère est intolérable et inacceptable. […] le pouvoir de l’argent est une menace pour nos sociétés. Le défi est d’affirmer la valeur de la personne pour réaliser la paix […]. » Tu es invité à nous rejoindre!