Les vies humaines (noires) ont de la valeur

Nepp ay nit lanu

 

Ñepp ay nit lañu – Tous, nous sommes des personnes.

Il n’est pas facile de traduire ce que disait Mamadou Sow. Mamadou est mort seul, malade, dans sa chambre. Lui, c’est la misère qui avait mis le genou sur son cou. Délaissé par sa famille, moqué par son voisinage ! Des jeunes du Mouvement ATD Quart Monde au Sénégal, qui avaient découvert son talent de sculpteur et la richesse de sa pensée, lui avaient néanmoins rendu sa dignité.

« La misère est l’œuvre des hommes et seuls les hommes peuvent la détruire » a dit Joseph Wresinski, fondateur du Mouvement ATD Quart Monde. La mort d’un Afro-Américain sous le genou d’un policier insensible à ses gémissements est bien la manifestation que la misère est une œuvre humaine. Face à cette image, nous voulons croire que les hommes et les femmes peuvent la détruire. Mais il ne suffit pas de lever le genou. La misère et le mépris étaient là avant l’arrivée de ce policier.

Plus près de nous, des personnes âgées sont mortes de déshydratation, sans avoir été lavées, sans avoir été écoutées. Dans les CHSLD, étaient également victimes de la misère les employés qui avaient la tache de prendre soin des personnes âgées. Là, ce n’était pas un genou sur le cou, mais une charge de travail immense, sans estime ni reconnaissance professionnelle, pour un petit salaire.

Ñepp ay nit lañu – Nous sommes tous des humains.

Le Mouvement ATD Quart Monde milite avec et pour toutes les personnes vivant dans la misère. Oui, il s’avère que plusieurs familles noires vivent dans l’humiliation de la misère, aux États-Unis, dans nos CHSLD et ailleurs. Oui, elles sont nombreuses. Nous affirmons donc que la vie de chaque personne noire est une vie humaine. Les Premières Nations du Canada souffrent de la misère dans plusieurs lieux, mais s’ajoute le mépris de leurs cultures et de leur Histoire. Par conséquent, nous affirmons aussi que la vie de chaque membre des Premières Nations est une vie humaine. Les droits de la personne ne sont pas différents selon l’appartenance culturelle ou la couleur de peau.

De tous les pays et dans toutes les cultures, nous trouvons ces gens qui partagent une expérience commune de la misère et du mépris, à nos yeux ils forment un peuple transversal à tous les continents et à toutes les cultures – le Quart Monde.

Ñepp ay nit lañu – Nous tous au complet, nous sommes des humains.

Ñepp ay nit lanuDes jeunes ont découvert et fait connaître la richesse de la pensée de Mamadou Sow. De même, c’est en diffusant la pensée des personnes vivant la misère et en permettant leur participation que les véritables changements de nos sociétés pourront advenir. Il ne suffit pas d’ajouter des représentants de diverses communautés et minorités sur des comités. Nous devons faire de la place à leurs pensées, leurs idées, leurs compréhensions. Le défi ne s’arrête pas là. Les personnes noires et des Premières Nations et, selon la préoccupation de notre Mouvement, les personnes vivant la pauvreté ont aussi la volonté d’exprimer leur pensée, leurs réflexions sans la crainte d’être reçues avec condescendance et la société a besoin de cet apport. Nous devons construire des ponts et les traverser pour nous rencontrer en tout respect.

Ñepp ay nit lañu – Tout un chacun, nous sommes quelqu’un.

Pour le racisme, comme pour la misère, les changements ne sont pas magiques. Ceux qui détiennent le pouvoir doivent accepter que leur privilège de réfléchir aux enjeux de société et de prendre les décisions soit partagé avec les personnes qui vivent la misère et qui sont concernées. D’autre part, les personnes en situation de pauvreté et les personnes racisées ont besoin de se former à prendre la parole, elles doivent apprendre à clarifier leur pensée, leur savoir d’expérience et à en reconnaître la valeur.

Au cœur du Mouvement ATD Quart Monde se développe cette formation afin que les personnes exclues de la société par la pauvreté et les préjugés puissent devenir pleinement citoyennes et participantes à l’« évolution tranquille » de notre société à laquelle invite notre Premier Ministre.

Ñepp ay nit lañu – Nous tous, en même temps, sommes humains également